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Pour un champ d'OGM fauché en 2010, André Puygrenier est convoqué au tribunal et Yves Manguy est volontaire pour comparaître. Procès des militants lundi après-midi à Tours.

André Puygrenier (au second plan) est convoqué au tribunal. Les deux autres faucheurs charentais, dont Yves Manguy, revendiquent leur action.Photo Renaud Joubert

André Puygrenier (au second plan) est convoqué au tribunal. Les deux autres faucheurs charentais, dont Yves Manguy, revendiquent leur action.Photo Renaud Joubert 

C'est pas extraordinaire, mais ça m'embête un peu. Normalement, je vais être condamné lundi. Mais à 75 ans, finalement, ça ne me dérange pas beaucoup.» André Puygrenier, agriculteur, venu au bio sur le tard à Courcôme et ardent militant de la cause paysanne, s'est fait une raison. Il n'ira pas en prison à la fin de l'audience correctionnelle au tribunal de Tours, mais il risque une sanction pour la destruction de cultures.

«Moi, ça me fait rigoler.» Il en faudrait plus pour déstabiliser Yves Manguy, l'ancien maire de Londigny, partisan d'une agriculture détachée des multinationales. «Ce qui me choque le plus, lâche encore André Puygrenier, c'est que l'UDSEA [Union départementale des syndicats d'exploitants agricoles, NDLR] locale appelle à manifester ce jour-là en disant que nous sommes des voyous.»

Obligation et nécessité

Voyous parce que militants anti-organismes génétiquement modifiés de toujours, ils ont participé au fauchage de deux parcelles (600 ares et 150 mètres carrés) du côté de Sorigny en Indre-et-Loire en 2010. Deux «parcelles de démonstration» de tournesol «muté», modifié aux radiations ou aux produits chimiques, assimilé par ses détracteurs aux semences génétiquement modifiées. «C'est du transgénique», tranche Yves Manguy.

Le fauchage est illégal. Alors la semaine dernière, pile à la limite du délai légal de dix jours, André Puygrenier a reçu la convocation qui dormait depuis le mois d'août, transmise au tribunal de grande instance d'Angoulême. Pourtant à l'époque, les gendarmes, qui avaient débarqué un peu à la bourre une fois le forfait accompli et qui étaient tombés sur les derniers du groupe autour du pneu crevé de la voiture des Charentais, n'étaient pas vraiment sûrs pour André Puygrenier.

«Moi, j'étais même passé à la télé et il ne m'est rien arrivé», s'offusque Yves Manguy. Alors, lundi, comme l'autre Charentais Patrick Rivolet, il sera «comparant volontaire». «On va demander au juge de comparaître nous aussi. Parce que l'on assume, parce que c'est une action d'alerte à laquelle on a décidé de participer individuellement. Parce que l'on revendique notre action, même.» C'est un principe chez les faucheurs volontaires. Ils s'inscrivent sur une liste avant de passer à l'action. Mais ce jour-là, s'ils étaient 119 sur la liste, seuls 3 se retrouvent prévenus. André Puygrenier le Charentais, Fabien Hauyez de l'Yonne, et Bruno Stree de Toulouse, qui n'a même pas reçu sa convocation.

Mais ils seront 74 au procès à réclamer le jugement au président du tribunal. Sans trop d'espoir. «On est au rôle d'une audience normale, au milieu d'autres affaires.» Les militants ne se font pas d'illusions. Ils ont tout de même convoqué leurs témoins, des scientifiques qui se sont intéressés aux plantes mutées, aux OGM, aux «firmes» qui «à défaut d'obtenir de la prison, se voient attribuer des dommages et intérêts exorbitants», s'enflamment les deux agriculteurs.

Ils ne renient rien de leur engagement, confirment qu'ils ont déjà fauché. «Même avec mon écharpe tricolore», insiste Yves Manguy. Pourtant, détruire des cultures, «en tant que paysans, ça n'est pas [leur] truc». «Mais on a obligation, nécessité de passer par là», justifie André Puygrenier, lui qui, plus jeune, féru de progrès, s'émerveillait devant les vertus des désherbants avant «la prise de conscience de la pollution par les nitrates, il y a longtemps, de la dépendance aux firmes pour les semences, de la contamination de l'environnement».

«Une impasse», appuie Yves Manguy. Alors, lundi, ils feront du tribunal leur tribune. Pour dire que s'ils sont faucheurs volontaires et hors-la-loi, ils ne se sentent pas voyous pour autant. «Mais militants.»

 


source: Charente libre

Tag(s) : #Procès-Condamnations
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